La Crise de l’Eau viendra.

Maroc 2030-2050 : L’eau, cette bataille que nous pouvons encore gagner

Sous-titre : Entre urgence climatique et solutions ancestrales, le royaume se trouve à un carrefour hydrique

Chapeau :
Les chiffres sont formels : d’ici 2050, le Maroc connaîtra des pénuries d’eau graves. Pourtant, des solutions existent, mêlant innovations high-tech et savoir-faire traditionnel. Reportage au cœur d’une crise annoncée, mais pas inéluctable.

Le compte à rebours est lancé.

Dans les campagnes du Souss, les puits creusés à la hâte ressemblent à des cicatrices. Ahmed, un agriculteur de Taroudant, montre du doigt son pompage solaire flambant neuf : "Il y a dix ans, on trouvait de l’eau à 30 mètres. Aujourd’hui, il faut descendre à 150 mètres, et elle est souvent salée."

Cette course vers le fond n’est qu’un symptôme. Selon le GIEC, les températures marocaines pourraient grimper de 4°C d’ici 2050, tandis que les précipitations diminueront drastiquement. La Banque Mondiale prévient : les sécheresses passeront d’exceptionnelles à quasi-annuelles.

Pourtant, à quelques kilomètres de là, une oasis tente de résister. À Tighmert, près de Guelmim, les habitants ont ressuscité les khettaras, ces canaux souterrains vieux de dix siècles. "Un système qui redistribue l’eau sans pompe, juste par gravité", explique Fatima, présidente de la coopérative locale.

Les solutions coulent déjà

Dans le Rif, un projet pilote fait parler de lui. À Chefchaouen, des jardins aquatiques filtrants épurent les eaux usées grâce à des roseaux et des plantes macrophytes. "Chaque bassin traite 20 m³ par jour, sans électricité", détaille le professeur El Amrani, de l’Université d’Al Hoceima.

Plus au sud, à Dakhla, les marais salants abandonnés connaissent une seconde vie. La start-up Blue Oasis y teste des zones de filtration passive : en laissant l’eau de mer circuler à travers des digues végétalisées, on obtient une saumure concentrée pour l’industrie, tout en dessalant partiellement l’eau.

Mais la vraie révolution vient peut-être du désert lui-même. À Ouarzazate, la station Noor ne produit pas que de l’électricité : ses panneaux solaires abritent désormais des condenseurs atmosphériques, capables de récupérer 40 litres d’eau par jour grâce à l’humidité nocturne.

L’urgence d’agir ensemble

Le temps presse. Si les nappes phréatiques du Souss continuent de baisser au rythme actuel, elles pourraient être irrécupérables dès 2040. Pourtant, des initiatives montrent la voie :

  • À Midelt, la reforestation de l’arganier et du caroubier a permis de recharger les nappes de 12 % en cinq ans

  • À Agadir, l’usine de dessalement solaire alimente déjà 30 % de la ville en eau potable

  • Dans le Haut Atlas, les barrages collinaires traditionnels font leur retour, retenant les eaux de ruissellement

"Nos ancêtres vivaient avec 200 mm de pluie par an. Nous devons réapprendre cette sagesse", conclut le chercheur Mohammed Elloumi. Entre high-tech et low-tech, le Maroc possède tous les outils pour éviter le pire. Reste à les utiliser à temps.

Fin

Sources :

  • Étude prospective ONEE 2023

  • Projet ANCFCC de recharge des nappes

  • Données Météo Maroc 2024

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