Fiche Technique :
Banques Fourragères Communautaires
– Une Solution Résiliente pour les Zones Arides
Contexte et Principes Fondamentaux
Dans les régions semi-arides du Maroc où les sécheresses récurrentes ont réduit de 40% la disponibilité fourragère depuis 2015 (Ministère de l'Agriculture, 2023), les banques fourragères communautaires émergent comme une réponse pragmatique. Inspirées des anciens systèmes de stockage collectif berbères (agadirs), ces structures modernisées permettent aux éleveurs de faire face aux déficits saisonniers. Leur conception repose sur trois piliers : conservation optimale des ressources, gestion participative et valorisation des savoirs locaux.
Mécanismes Techniques et Performances
Les recherches menées par l'INRA de Settat (2021-2023) dans la province de Midelt ont démontré l'efficacité du modèle. Une banque type couvrant 5 hectares peut approvisionner 150 têtes de bétail pendant 4 mois de soudure. Le choix des espèces combine plantes locales résistantes (Atriplex, Opuntia) et cultures fourragères améliorées (Sorgho fourrager, Vicia sativa), sélectionnées pour leur faible besoin en eau (maximum 250 mm/an) et leur valeur nutritionnelle (minimum 7% de protéines brutes).
Mise en Place et Gestion
La création d'une banque fourragère requiert une approche méthodique. La phase préparatoire inclut une analyse pédoclimatique détaillée et des ateliers de concertation avec les éleveurs. Le site idéal présente une pente inférieure à 5% et un accès facile à une source d'eau, même limitée. La plantation s'effectue en octobre-novembre, avec un espacement de 1,5 m entre les plants d'Atriplex et 0,5 m pour les cultures annuelles. Un système de rotation permet de maintenir la productivité sur 7 à 10 ans.
Impacts Socio-économiques et Environnementaux
L'étude de l'Université Mohammed VI Polytechnique (2023) sur 15 banques pilotes révèle des résultats significatifs. Les éleveurs participants ont réduit leurs achats d'aliments concentrés de 60%, économisant en moyenne 8 000 DH par an. La pression sur les parcours naturels a diminué de 45%, permettant la régénération de 12 espèces végétales menacées. Sur le plan social, ces structures ont créé 3 à 5 emplois permanents par site et renforcé les liens intergénérationnels grâce à la transmission des savoirs pastoraux.
Innovations et Bonnes Pratiques
Plusieurs adaptations techniques améliorent l'efficacité du système. L'introduction de séchoirs solaires permet de transformer les excédents en foin de qualité, prolongeant la disponibilité fourragère jusqu'à 10 mois. Des contrats de pâturage rotatif, établis avec les communes, optimisent l'utilisation des ressources. Certaines banques expérimentent des systèmes de crédit fourrager, où les éleveurs "empruntent" des rations qu'ils remboursent après la saison des pluies.
Défis et Perspectives
Malgré leurs avantages, ces structures rencontrent des obstacles. La concurrence pour l'usage des terres, particulièrement près des centres urbains, complique leur implantation. Le changement climatique impose d'adapter constamment le choix des espèces. Les recherches en cours explorent l'intégration de légumineuses arbustives comme l'Acacia saligna, qui pourraient simultanément améliorer les sols et fournir du fourrage supplémentaire.
Références et Sources
Manuel des Techniques Pastorales en Zones Arides (DREF, 2022)
Étude "Résilience des Systèmes Fourragers" (INRA, 2023)
Guide pratique des Banques Fourragères (Programme des Nations Unies pour le Développement, 2021)
Données de suivi des projets pilotes (Agence pour le Développement Agricole, 2024)
(Ce modèle, d'un coût moyen de 120 000 DH pour une unité de base, présente un retour sur investissement en 3 à 5 ans selon les conditions locales. Son adoption dans le cadre du Plan Génération Green en fait un outil clé de la sécurité alimentaire du bétail.)